Adhénora ma gueuse, Joëlle Richard-Gallinelli

Publié le par Geneviève

éditions Buchet-Chastel

 ..Joëlle Richard Gallinelli a voulu reconstituer l’atmosphère qui régnait à la fin du XVIè et au début du XVIIé siècle. Ce livre est dans la même verve que ceux de Jeanne BOURIN, la romancière historienne qui situe ses ouvrages dans le haut moyen âge…
LE PROGRES DE CORNOUAILLE novembre 2000

jgallinelli@yahoo.fr


C'est sur la trame historique d'une Bretagne du début du XVIle siècle tissée d'une documentation riche et précise que se déroule l'histoire d'Adhénora, ardente figure féminine à la conquête de sa liberté. Née de parents manants, victimes des fléaux qu'engendrent la pauvreté et une époque troublée, Adhénora n'aura de cesse de s'affranchir de sa condition misérable. Pour cela, elle va devoir affronter un monde patriarcal, engoncé dans des superstitions religieuses. D'autres portraits de femmes émergent, témoins de ses adversités et de ses triomphes… Des hommes accompagnent Adhénora dans sa quête d'elle-même et les nombreuses épreuves qu'elle va traverser …. Le destin d'Adhénora va alors s'accomplir…

Extraits :

Dès qu’ils furent à portée des éventaires, ils se retrouvèrent dans le milieu affairiste et agité des vendeurs, acheteurs qui, tout en se saluant avec courtoisie, se jaugeaient, s’évaluaient, s’observant, comme si de rien n’était,en palpant les marchandises exposées. Certains, plus cordiaux, se hélaient en se reconnaissant, au moyen de signes étranges, tandis que d’autres, frappés de stupeur par la rapidité des échanges inattendus, pestaient après ces tractations plus ou moins illégales qui les mettaient dans les difficultés. Quelques invectives ou jurons se perdirent au milieu des embrassades, serrements de mains, étreintes, assortis de jurements et de promesses oubliées l’heure suivante.

Apeurée, Adhénora réussit enfin à se frayer un chemin, ramenant tant bien que mal son châle déchiré sur ses épaules. Elle avait perdu Lucresse et ne savait comment s’y retrouver dans ce dédale de venelles sentant la vieille crasse et l’humidité. Quelques mendiants chercheurs de pain la dévisagèrent de leurs yeux éraillés et hagards, tendant vers elle leurs mains sales. Ne sachant si c’était pour mendier ou porter atteinte à sa vie, elle faillit hurler de peur et détala terrorisée, cherchant le passage qui lui ferait abandonner ce quartier misérable où s’entassaient, dans un enchevêtrement de masures éventrées et de hardes suspendues, voleurs et pauvres hères.

Surpris de devoir rendre des comptes à la jeune fille, les paysans de ce village lui réservèrent un accueil plutôt distant. Pire, feignant de l’ignorer, ils s’adressèrent à Pierre qui verdissait de gêne de minute en minute.
Sous l’affront, Adhénora, blême de rage arracha le fouet des mains de Pierre, se campa devant lui, et se payant d’audace fit tomber une à une les pièces de toile qu’elle déroula sans ménagement. "Faut-il vous en dérouler… quelques aunes de plus, bonhommes, pour que vous compreniez que c’est à moi que la charge est donnée d’en faire le commerce ?"

Quelquefois, Adhénora s’aventurait avec Pierre, sur des chemins caillouteux surplombant les récifs creusés de failles. Elle allait jusqu’au point culminant, dénouait ses cheveux, et restait immobile, face au vent, défiant l’océan qui lui avait ravi son père. Elle restait ainsi une éternité, qui plongeait chaque fois le pauvre garçon dans une peur bleue. Elle ressemblait à ces femmes de marins qu’on rencontre sur les collines, guettant les voiles d’un navire porté disparu et qu’un effroyable désespoir semble avoir sculptées dans le granit.

 

Pour en savoir plus, rejoignez Adhénora :   http://jgallinelli.free.fr

 

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